
- Introduction :
Après le concordat de 1802, de grandes missions furent prêchées en France sous l’impulsion du pape Pie VII pour raviver la foi et revaloriser la vie chrétienne. Les Pères de la Foi donnèrent simultanément, dans cinq paroisses de la ville d’Amiens, une mission qui s’ouvrit le 29 avril 1804 et qui dura jusqu’au 24 mai. La mission eut un plein succès ! Julie et Françoise y avaient apporté leur collaboration en instruisant les femmes du peuple.

Après sa guérison miraculeuse (à Amiens, le 1er juin 1804), Julie partit pour Saint-Valery-sur-Somme et Abbeville avec les Pères Thomas et Enfantin. Ses lettres témoignent de son activité apostolique et de la réussite de la mission à Saint-Valery, au cours de laquelle 40 mariages furent réhabilités. De la mission d’Abbeville, on connaît peu de choses, les archives ayant brûlé pendant la guerre de 1940.


Voici une lettre de Julie à son amie Françoise restée à Amiens :
A sœur Blin, à Amiens – JMJ – (St-Valery) Ce 23 juin 1804
[…] La mission de St-Valery va très bien. […], nos bons Pères sont contents et surtout Mr le Curé. Il y a des personnes qui depuis 30 ou 40 ans ne s’étaient plus confessées et qui sont publiquement revenues à Dieu. Il vient beaucoup de monde aux instructions qui se font le soir ; le matin, il y en a moins. Je ne puis me lasser d’admirer la bonté de Dieu. Ah ! Qu’il est bon, mes chères filles ! […]
Savez-vous une chose ? C’est qu’à St-Valery, j’ai à instruire des hommes tout aussi ignorants que ceux qu’on m’adressait durant la mission d’Amiens ; je fais ce que l’on me dit – toujours une pauvre servante inutile -, je suis persuadée que le bon Dieu se passerait très facilement de moi, pauvre chétive créature. Je vous écris à la hâte ; vous me lirez comme vous pourrez. Je finis ma lettre en présence d’un homme à qui j’apprends : Je crois en Dieu. Il a près de quatre-vingt-dix ans, n’a pas fait sa première Communion, mais a la meilleure volonté du monde. […]
L’ordre, donné en août par le pouvoir aux Pères de la Foi, de quitter le diocèse d’Amiens, interrompit l’activité missionnaire de Julie.

Julie a dû certainement se remémorer cette étendue d’eau à perte de vue à Saint-Valery-sur-Somme, lors de sa vision du 02 février 1806, à savoir que ses filles iraient par-delà les mers. Ce qui lui fut confirmé par Mgr de Broglie lors de son arrivée à Gand en 1807 (malgré les fortes oppositions qu’elle rencontra à l’époque avec l’évêque d’Amiens et le supérieur de la communauté d’Amiens, Mr de Sambucy, qui ne comprenaient pas ses vues): « Non, Mère Julie vous n’êtes pas faite pour rester dans un seul diocèse »
Cela ne rejoint-il pas l’envoi de l’Evangile « Allez par le monde entier proclamer la Bonne Nouvelle à toutes les nations » Mc 16,15.
Et c’est ainsi que, guérie de sa paralysie qui lui donna tant d’occasions de prière contemplative, Julie garda toujours la conviction de ce que Dieu lui avait donné à voir et à proclamer.
« Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons » Jn1, 3
- Quelle est la source de l’action évangélisatrice ?
Écoutons d’abord ce que nous en dit aujourd’hui le Pape François dans son exhortation « La joie de l’Evangile » (tous les N° indiqués face aux paroles du Pape proviennent de ce document) :
« Si quelqu’un a accueilli cet amour qui lui redonne le sens de la vie, comment peut-il retenir le désir de le communiquer aux autres ? ( N° 8 )
En parallèle, voici maintenant la voix de Julie :
« Une personne qui aime bien le bon Dieu fait de grandes choses avec lui et devient un puissant apôtre » (Julie thèmes)
« Dans la miséricorde et l’amour, Dieu nous a donné assez de grâce et de force pour devenir apôtre » (Julie conférence 1812)
« Combien le bon Dieu est bon, ah ! oui ! Que ne pouvons-nous le faire entendre à tout l’univers »
D’autres paroles du Pape François :
« Dans toute forme d’évangélisation, la primauté revient toujours à Dieu, qui a voulu nous appeler à collaborer avec lui et nous stimuler avec la force de son Esprit. On doit toujours manifester que l’initiative vient de Dieu, que c’est « lui qui nous a aimés le premier » (1Jn 4,19) et que « c’est Dieu seul qui donne la croissance » (1Co 3,7) Cette conviction nous permet de conserver la joie devant une mission aussi exigeante. Elle nous demande tout, mais en même temps elle nous offre tout. » (N° 12)
N’est-ce pas aussi la conviction intime de Julie ?
« Si on ouvrait simplement les yeux de la foi, disait Mère Julie, en se rendant à la chapelle, on se sentirait dans un lieu où le bon Dieu nous attend, où il nous regarde, où il s’offre à nous, les mains pleines de grâces et le cœur prêt à nous recevoir ».
Notre spiritualité est apostolique, dans la tradition de sainte Julie. Son expérience unique de la prière et de l’action lui fit trouver la présence de Dieu partout, et d’une manière spéciale parmi les pauvres. « Nous ne sommes que pour les pauvres, absolument que pour les pauvres. »
« Confions-nous bien au bon Dieu : c’est la seule prière que je puisse faire : « Mon Dieu, c’est votre œuvre » Avec cela, je vais à travers toutes les difficultés » (Julie, Lettre 434)
« Le bon Dieu a permis que je sois bien dépouillée de toutes sortes d’appuis. Il ne faut que Dieu seul pour son œuvre » (Julie, Lettre 74)
« Il faut mettre toute notre confiance au bon Dieu, ma bonne fille ; vous et moi, nous ne devons faire que cela du matin au soir et lui dire : « Mon Dieu, c’est votre ouvrage, c’est votre ouvrage »
- Ce qu’est l’évangélisation et ce qu’elle n’est pas.
Dans « La joie de l’Evangile », le pape François nous rappelle au N° 14:
« Tous ont le droit de recevoir l’Evangile. Les chrétiens ont le devoir de l’annoncer sans exclure personne, non pas comme quelqu’un qui impose un nouveau devoir, mais bien comme quelqu’un qui partage une joie, qui indique un bel horizon, qui offre un banquet désirable. L’Eglise ne grandit pas par prosélytisme mais par « attraction ».
Voix de Julie :
« Tâchez de bien vous remplir de l’esprit du bon Dieu pour aller auprès des pauvres malades ; ne pas parler tout de suite de religion, car souvent cela rebute les personnes qui n’en ont pas ou fort peu. (Julie, Lettre 281)
Le pape François au N° 10:« Que le monde de notre temps qui cherche, tantôt dans l’angoisse, tantôt dans l’espérance, puisse recevoir la Bonne Nouvelle, non d’évangélisateurs tristes et découragés, impatients ou anxieux, mais de ministres de l’Evangile dont la vie rayonne de ferveur, qui ont les premiers reçus en eux la joie du Christ ».
Voix de Julie :
« On choisit des personnes d’un caractère gai pour former les enfants ».
Julie n’est-elle pas appelée : « la sainte qui sourit ? » .
« Le bon Dieu aime une âme qui reconnait en Lui son Père bien-aimé ; Il chérit une enfant qui se livre tranquillement, joyeusement à son amour ».
« Si on donne l’autorité à une personne d’humeur sombre, bientôt toute la maison sera sans joie. La joie du Saint -Esprit doit paraitre dans tout votre extérieur ; ainsi seulement, vous pourrez attirer les âmes à Dieu ».
Le pape François au N° 242 :
« La foi ne craint pas la raison ; au contraire, elle la cherche et lui fait confiance, parce que « la lumière de la raison et celle de la foi viennent toutes deux de Dieu ».
Voix de Julie :
« Parlez raison avec vos enfants, religion sans doute, mais commençons par la raison, cela est la chose du monde la plus utile pour entrer dans leur cœur ». (Julie, Lettre 206)
- Un message universel
Le pape François au N°181 :
Il s’agit du critère d’universalité, propre à la dynamique de l’Evangile, dès lors que le Père désire que tous les hommes soient sauvés et que son dessein de salut consiste dans la récapitulation de toutes choses, celles du ciel et celles de la terre sous un seul Seigneur qui est le Christ (EP,1,10).
Voix de Julie et de Françoise :
« Notre charité ne doit pas se limiter à l’amour que nous avons les unes pour les autres. Elle doit rendre notre amour vaste comme l’univers ». (Julie, Thèmes)
« Nourrissez en vous la flamme apostolique et tenez-vous prêtes : la mission de l’univers entier entre dans le but de notre Institut », disait aussi son amie Françoise Blin de Bourdon
« Combien le bon Dieu est bon, ah ! oui, oui ! que ne pouvons-nous le faire entendre à tout l’univers » (Julie, Lettre 45)
Pour Julie et Françoise, ce n’était pas seulement une vision, ni des conseils mais c’est leur vie entière donnée infatigablement dans ce sens de l‘universalité. Rappelons-nous l’ouverture de communautés partout dans le monde.

Dans le livre « l’appel de la route » d’Agnès Richomme, après avoir expliqué les fondations d’Amersfoort et de Coesfeld, nous lisons : « Ainsi, sans aucun lien juridique avec l’Institut de Namur fondé directement par Mère Julie Billiart, deux Congrégations se réclament de son esprit et restent fidèles à sa mémoire, se considérant à bon droit ses filles ». Il s’agit de nos cousines, les SND d’Amersfoort et les SND de Coesfeld.
N’est-ce pas un beau témoignage donné, non seulement à la valeur intrinsèque de cet esprit de la Mère Julie, mais aussi à sa puissance d’adaptation ?
La congrégation des SND d’Amersfoort fondée le 29 juillet 1822 s’est formée après que trois candidates hollandaises furent admises au noviciat de Gand par Mère Saint-Joseph en 1819. Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien (http://www.snddenheritagecentre.org/MUSEE/index.php/expansion-dans-le-monde/nos-cousines-et-associes/amersfoort)

En 1850, l’abbé Elting, de Coesfeld, et l’évêque de Münster sollicitèrent l’aide des SND d’Amersfoort pour former à la vie religieuse deux institutrices qui s’occupaient d’orphelines. Trois SND d’Amersfoort arrivèrent à Coesfeld en Allemagne où les candidates furent instruites selon l’esprit et la Règle des SND. Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien (http://www.snddenheritagecentre.org/MUSEE/index.php/expansion-dans-le-monde/nos-cousines-et-associes/coesfeld)

C’est ainsi que des liens étroits se sont établies entre les trois congrégations. Même si elles ne reconnaissaient pas Julie Billiart comme leur fondatrice, les SND d’Amersfoort et de Coesfeld ont une réelle dévotion envers elle.
Aujourd’hui, les Sœurs de Notre-Dame d’Amersfoort sont présentes en Hollande, Indonésie, Malawi, Philippines et Malaisie et sont engagées dans l’éducation, le travail pastoral et les soins de santé (http://srsourladyamersfoort.blogspot.com/). Quant aux SND de Coesfeld, elles sont principalement engagées dans l’éducation mais travaillent aussi dans des cliniques, s’occupent de homes pour personnes âgées, pour enfants abandonnés ; elles œuvrent dans l’enseignement spécial pour handicapés, … (http://snd1.org/en/)
Régulièrement, nous recevons à Namur la visite de nos cousines, présentes aux quatre coins du monde ! C’est toujours une joie pour nous de découvrir à quel point leur amour pour Sainte Julie est très fort.


- Un Message toujours nouveau
« Quand on réussira à exprimer de façon adéquate et avec beauté le contenu essentiel de l’Evangile, ce message répondra certainement aux demandes les plus profondes des personnes, parce que nous avons tous été créés pour ce que l’Evangile nous propose : l’amitié avec Jésus et l’amour fraternel. » N° 265
- Avec Marie, Mère de l’évangélisation
Pape François :
Avec l’Esprit-Saint, il y a toujours Marie au milieu du peuple. Elle était avec les disciples pour l’invoquer (Ac.1,14) et elle a ainsi rendu possible l’explosion missionnaire advenue à la Pentecôte. Elle est la Mère de l’Eglise et sans elle nous ne pouvons comprendre pleinement l’esprit de la nouvelle évangélisation. (N° 284)
Voix de Julie :
« Il faut bien rester avec la Sainte Vierge dans le Cénacle, être avec les apôtres, pour y persévérer dans la prière, avec toute la sainte Eglise. (Julie, Lettre 208)
